L.A.2 : « Tu vas
mourir dans une heure et demie [...] le mieux de la fin » p. 37 à 44
Situation
du passage : le roi arrive tardivement
sur scène p.30. Il est déjà apparu dans la scène d’exposition mais juste
pour passer. Il n’est pas resté et n’est pas intervenu. Ionesco veut créer un
effet d’attente et faire de l’arrivée du roi un événement.
Moment
clef de la pièce puisque c’est là que le roi apprend des autres personnages
qu’il va mourir. Cela peut paraître
étrange mais c’est conforme à la réalité : c’est souvent une tierce
personne qui nous apprend notre propre mort, notamment un médecin. Parfois, par
ménagement, c’est un membre de la famille, comme ici : ce sont Marguerite
et le médecin qui apprennent au roi sa mort prochaine.
PBQ :
Montrez ce qu’il y a de tragique et de comique
dans ce passage ?
Quels sont les registres de ce
texte ?
En quoi cet extrait est-il une
farce tragique ?
I
En effet, ce passage est tragique
A.
Le tragique se manifeste tout d’abord par la mort
inéluctable du roi
Ex 1 : Répétition +
temps verbal « Tu vas mourir » répété
4 fois l. 2-7-11
→Insiste et montre que cette mort
est inévitable.
→L’emploi
du futur proche renforce cet aspect inévitable et proche de la mort du roi.
C’est
la fatalité : fatum. Puissance contre
laquelle on ne peut rien. C’est une force qui s’oppose au libre arbitre de
l’homme. A la l.14, « pour l’éternité » insiste sur le caractère
« irréversible » de cette mort comme le disait Marguerite au début de
la pièce.
→Tragique.
→Pitié.
Seule Marie en témoigne avec son exclamation/ invocation à Dieu l.8.
Ex 2: CL de la maladie
Maladie du Roi
Adjectif « malade » employé
également par Marguerite l.27, on parle
de « douleurs » l.33, le roi crie « aïe » l.38 et il semble
même malgré lui avouer sa maladie puisqu’il déclare : « c’est parce
que je ne me suis pas mis dans la tête de ne pas avoir mal »l.38-39
→mise
en évidence de la maladie du roi contrebalancé par son déni« je me porte
bien » l.18, « je ne suis pas malade » 2X l.28 -29
→le roi
refuse d’accepter sa mort.
Maladie du garde
« goutte
et rhumatismes » l. 99-100. Il se paralyse l.112-113, il est
« pétrifié » l.122 « symptôme caractéristique ». A travers
le garde, c’est « l’armée » qui est paralysée, victime d’un virus
l.102-104.
Lorsque
le médecin dit l. 124-125 « c’est un symptôme caractéristique.
Médicalement, c’est très net », il sous-entend que cette paralysie de
l’armée et du garde correspond à la dégradation physique du roi et à la perte
de son pouvoir. Car un roi sans armée n’a plus de pouvoir.
Ex 3 : Négations du verbe ²pouvoir² : « tu ne peux
même plus » l.28 et l.43-48 structure parallèle : « tu ne peux plus »
/ « tu n’as plus de pouvoir » 2X / « tu ne peux plus » /
« tu n’as plus de pouvoir » qui donne l’effet d’une litanie et d’une
fatalité implacable qui s’acharne contre lui.
Ex 9
B.
Il se manifeste également par lutte désespérée du roi contre la mort
Ex 1 : CL du complot
- Il accuse tt d’abord
Marguerite l.220-21 qui aurait tjs souhaité sa mort
- Il envisage ensuite
un vaste « complot » l.69 dont le but serait alors de le faire
abdiquer et dont feraient partie Marguerite et le médecin. Ces comploteurs
sont des « fous » ou des « traîtres » l.74 à moins que
ce ne soient p. 42 « des conjurés, des bolcheviques »
l.140 qu’il tente de faire arrêter l.80
→Le roi
essaie de trouver des causes externes à sa déchéance = victime de son
entourage.
Ex 2 : Répétition : Il tombe 4 fois l.141 à 164
et à chaque fois se relève.
→Montre
son acharnement à rester en vie.
Ex
3 : Antithèses
- p.42 Tout d’abord on note le décalage entre le
geste et la parole : l. 135 « fait un grand effort » /
l.137 « tu vois comme c’est simple »
Ex 4 : Répétition adverbe
« péniblement » l. 144-149-156→insiste
bien sur la difficulté de l’effort et la dégradation physique du Roi.
II
Mais, Ionesco introduit des éléments comiques dans cette situation
tragique.
Le but du comique est de
faire jaillir le rire. C’est un repoussoir au tragique.
A.
Le comique vient en premier lieu de
l’incongruité de la situation: certains éléments ne sont pas adaptés aux
circonstances, bizarres par rapport au monde et à l’univers présenté.
Ex 1 : CL de la
cuisine :
-p.
37 l .11-14
très terre à terre. Mourir, c’est
d’abord ne plus avoir besoin de se nourrir = anéantissement du corps et
disparition de tout ce qui est de l’ordre des sens.
→Comique
vient du décalage entre les propos du médecin, triviaux et les circonstances
tragiques. Propos pas adaptés aux circonstances.
Ex 2 : Image l.55-57 d’un monde qui tombe dans un trou. On sourit à
l’évocation des ministres qu’on ne peut plus « repêcher ». On sourit
également à la paralysie de l’armée.
Ex
3 : L’utilisation du sceptre comme
béquille relève aussi d’un humour pathétique. l.149. →Burlesque. On note
la symbolique très forte
Þ Une vision grotesque de la mort : d’un
comique contrefait, extravagant, bizarre.
B.
En outre, le comique provient du jeu théâtral
Ex 1 : la didascalie
antithétique l.172-173 « guignol tragique ».
Renvoie bien à la double thématique comique et
tragique.
« guignol »:
Personnage ridicule
« Guignol » :
personnage de théâtre de marionnettes de tradition lyonnaise, symbolisant
l’esprit railleur et frondeur du peuple.
Þ le jeu des acteurs doit donc avoir quelque chose
de mécanique. Renvoie au comique de gestes et au genre de la farce où
les personnages ont des réactions
parfois mécaniques.
Or
Bergson définit ainsi le rire : « le rire, c’est de la mécanique
plaquée sur du vivant ».
Þ le jeu des acteurs comme des marionnettes les
déshumanise et nuit à la vraisemblance. Quel est le but de cette
déshumanisation ?
Ex
2 : comique de geste : les
quatre chutes successives du roi et le jeu de scène comique avec les
apparitions successives de Juliette qui crie « vive le roi »
l.160-165 . Elle apparaît comme un diable dans une boîte.
Ex 3: comique de mots
Les
répliques de Marguerite et du médecin en échos ont le même effet : l.
62-64, 68-70, 174- 176. ®
renvoie aussi à la farce où les personnages n’ont pas de caractère
individuel, pas de liberté individuelle. Ce sont des personnages fantoches.
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