L.A
« Colloque* sentimental » *
Entretien entre 2 personnes
Dernier poème des Fêtes galantes.
Ferme le recueil d’une manière sombre,
voire lugubre. Les pers. ne sont plus d’insouciants danseurs mais des spectres,
c’est-à-dire des revenants, figures chères de la littérature fantastiques du
XIXème siècle. On assiste à un dialogue entre 2 anciens amants. L’un se
souvient avec bonheur du temps passé et heureux de l’amour. L’autre ne se
souvient de rien et renie cet amour.
Comment Verlaine exprime-t-il ici le désespoir
amoureux ?
I
Tout d’abord, il exprime ce désespoir par un cadre spatio-temporel lugubre
A- En effet, la
souffrance est rendue par le décor
sombre voire morbide
Ex
1 : Connotation v1 et 5
« vieux parc solitaire et glacé » on est loin du décor traditionnel
des parcs des Fêtes galantes. Plutôt image d’un cimetière. Personnification du
parc par les adjectifs « vieux » et « solitaire ». Idée de
solitude, de vieillesse, très pessimiste qui connote la mort. L’adj
« glacé » introduit l’idée de froid, froid de la fin de l’amour, de
la mort. Eau morte puissance 2.
Ex 2 : La répétition du premier distique v. 5-6 crée un refrain, une
musicalité mais funèbre ici. (chanson triste)
Ex 3 : v. 15 « avoines folles « :
le vieux parc est envahi par les herbes sauvages. Symbole de la fuite du temps
aussi
On peut voir aussi un jeu de mot du
poète. La folle avoine est l’avoine
sauvage, stérile. Est-ce une manière de montrer que l’amour est désormais mort,
stérile ou que c’est folie de croire à la résurrection de l’amour ?
Ex
4 : Antithèse : par effet
de contraste cet aspect morbide est renforcé par la mention au v.13 du
« ciel bleu ».
B- Le désespoir
apparaît également dans l’évocation du temps
Ex 1 : fuite du tps inexorable marquée
·
Fuite du temps
matérialisée par la dégradation du décor v.1 « parc solitaire et glacé »
+ avoines folles→
·
l’emploi dans le discours des personnages du PC qui présente l’action comme définitivement terminée.
Ex 2 : v.16 « nuit » idée
de mort aussi.
Ex 3 : v. 2 jeu sur le double sens
du verbe « passer » : mourir si conjugué avec
« avoir » comme c’est le cas ici.
→l’amour
est mort. Le temps fait son œuvre. Impossibilité de retour en arrière, c’est là
le malheur.
II
Ce désespoir est exprimé en outre par les personnages
A- Car les personnages sont morbides eux-aussi
On retrouve la correspondance paysage/ sentiments
des personnages chère à Verlaine.
Ex
1 : métaphore : personnages
= des « formes » v. 2 puis des
« spectres » v.6 c’est-à-dire
des revenants. Par métonymie, ces
spectres / fantômes désignent l’amour mort que l’un des personnages tente de
faire renaître. Amour revenant.
Ex
2 : Néanmoins, dans ce dernier
poème, Verlaine nous plonge dans le fantastique :
on hésite entre réalité et irréalité.
-
Ces personnages
sont-ils des personnes ou des fantômes ?
-
Le poète est-il
l’une d’entre elle ?
-
Sommes - nous
dans la réalité ou dans un rêve puisque
« la nuit seule entendit leur parole » v. 16. ?
→ ≠ tableau de Watteau mais plutôt dans un tableau
romantique cf définition de « romantic » = accord entre l’âme et la
nature. Plus tableau de Friedrich Homme et femme contemplant la lune ou L’abbaye dans une forêt de chênes ou L’entrée du cimetière. Comme si à la fin
de son recueil, Verlaine revenait à la réalité de son siècle.
A partir de là leur description
correspond au type du revenant :
Ex3 :
CL de la mort :
-
v.2
« formes » non identifiée qui renvoie à l’idée du fantôme, sans
contour ni physionomie particulière ;
-
V3 « yeux
morts » : absence de regard,
-
v. 3
« lèvres molles » décrépitude des chairs ici symbolique car les
lèvres sont symbole du baiser et de la sensualité,
-
-
v. 4 voix
assourdies « on entend à peine leurs paroles ». Sortent la nuit v.16.
B- De plus,
leurs sentiments ne sont pas réciproques, ce qui entraine le désespoir
1. L’un est amoureux et cherche à retrouver les
sentiments amoureux d’autrefois
2.
L’autre n’est
plus amoureux et refuse de se souvenir
1.
Ex 1 : Le premier tutoie v. 7-9 : rappelle l’intimité tendre d’autrefois
·
Evoque leur
ancien amour qui était à la fois physique et sentimental
v.7 « extase » c’est –à-dire plaisir des
ébats, v. 12 « joignions nos bouches » périphrase ( Ex 2 ) pour
baiser →physique
et « cœur qui bat » v. 9 et v.10 rêve de
l’autre i .e sentiment, affect
·
Rappelle le
bonheur ancien avec un CL (Ex 3): « les beaux jours »,
« bonheur indicible » v. 11, « ciel bleu »v.12,
« espoir » v. 13. Hyperbole au
v.13 (Ex 4) qui marque leur
bonheur intense passé. L’enjambement
v.11-12 (Ex 5) souligne la volonté du pers de retrouver cette complicité
perdue. Le « ciel bleu » est une métaphore
(Ex 6) de l’amour heureux, du bonheur.
·
Les questions
( Ex 7)
qu’il pose v. 7-9-10 demandent à l’autre s’il est tjrs amoureux. Ces
questions affirment en fait son propre
amour et sont en même comme des
supplications adressées à l’autre pour qu’il redevienne amoureux
·
Il manifeste son
regret par l’exclamation et
l’interjection ( ex 8) v.11-12 et
par la tournure intensive ( Ex 9) « qu’il
était … » v. 14. Car au fond de lui, le pers sait que l’amour est fini v.7
« ancienne », v.12-13, utilisation de l’imparfait ( Ex 10)« joignions », « était ».
2.
Le deuxième
vouvoie v. 8 ce qui manifeste sa distance.
Nie à la fois
·
l’amour v. 10
« non » il n’est plus amoureux
·
le nom de l’autre
par l’écho ironique (Ex 11) à la
rime nom / non. Le nom de l’autre, son identité même est oubliée, voire
niée par l’indifférent
·
mais aussi le
souvenir même de cet amour v. 8 question
rhétorique (Ex 12) ironique qui est
l’équivalent d’une négation. Reprend de manière ironique les mots de son
interlocuteur pour mieux les nier. La question lui permet en outre de montrer
qu’il trouve les propos de son interlocuteur
ridicules. Il trouve ridicule de se souvenir de l’amour passé.
·
Le chiasme v.13-14( Ex 13) entre
« ciel » et « espoir » souligne l’opposition des
personnages qui ne partagent plus les mêmes sentiments. Il est le symbole de leur désunion.
Pointe de sadisme v. 12 laisse entrevoir
par l’emploi de l’expression « c’est possible » la possibilité d’un souvenir avant d’en
fermer définitivement la porte v.14 où il
ne laisse plus aucun espoir à l’autre v. 14. « Le ciel noir »
est symbolique de la mort de l’amour. S’oppose au ciel bleu et à l’espoir évoqué par le premier
personnage.
Ccl° : dialogue universel car
anonyme : qui est l’hô, la fê ?
La tentative
échouée de cet amant qui essaie de tirer
du néant un amour défunt rappelle l’attitude d’Apollinaire dans Poèmes à Lou. Alors que Lou lui a
clairement fait comprendre que tout était fini. Apollinaire lui écrit des lettres-
poèmes enflammés du front. Ne tente-il pas ainsi de faire revivre un amour
mort ? D’ailleurs sa volonté de sous titrer ses poèmes « Ombre de mon amour » ? ne
témoigne-t-elle pas, de la part du poète de la volonté de sauvegarder ce qu’il restait de son amour
(son « ombre »)
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