lundi 30 avril 2018

Emission de radio sur Verlaine et Les fêtes galantes 1ère L


Emission radio sur Verlaine

 Musique d’ouverture Debussy, « Petite suite », Cortège, du début à 1 min.04

Bonjour et bienvenue sur info RC. Nous nous retrouvons pour l'émission quelques minutes de littérature. Nous allons aujourd'hui parler poésie et découvrir un grand poète français : Verlaine et son recueil Fêtes galantes publié en 1869.

En choisissant ce titre, Verlaine fait directement référence aux peintures de Watteau, peintre du XVIIIème siècle,  créateur d'un nouveau genre pictural : la fête galante justement. Comme Watteau dans ses tableaux,  dans son recueil, Verlaine, rassemble dans des parcs un petit groupe de personnes nobles et raffinées, jouant de la musique et dansant. Ils sont aussi souvent déguisés et s'amusent à interpréter des pièces de la Commedia dell'arte. Dans ces parcs, la semi obscurité, les arbres, l’eau  des fontaines rendent l'ambiance propice à un badinage amoureux auquel les personnages  succombent facilement. Mais il s'agit d'un amour éphémère qui se terminera avec la fête. Dans ce recueil, la gaité est sœur de la mélancolie.

Claude Debussy - Clair de Lune, Arabesque No1,  Piano Classical Music, du début à 38 secondes


Bienvenue dans le monde des fêtes galantes.

« Clair de lune » le poème inaugural  donne la tonalité du recueil. C'est un poème  tout en contraste qui oppose à l'apparente joie des personnages une profonde tristesse. Déguisés en comédiens italiens, les personnages jouent de la musique et chantent : ils semblent heureux. Pourtant leur chanson est en « mode mineure », mode propice à la mélancolie.

« Tout en chantant sur le mode mineur
L'amour vainqueur et la vie opportune,
Ils n'ont pas l'air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune,
Au calme clair de lune triste et beau »

Ces personnages font donc illusion. « Personna » en grec ne signifie-t-il pas « masque » ? Même s'ils ont mis sur leur visage le masque du bonheur, ils gardent au fond d’eux une sourde langueur. C'est sans doute l'expression de la mélancolie propre du poète.
Mais chez Verlaine cette tristesse n’est pas négative : elle est belle. Musique Musique Debussy, «  Rêverie », du début à 44 secondes.

L'un des thèmes majeurs du recueil est l'amour. On ne s'en étonne pas car la vie de Verlaine est rythmée par des passions. Celle de sa mère, tout d’abord, pour qui Verlaine est l’enfant miraculeux : il est né après trois fausses couches. Celle de Mathilde « la petite épouse » raffinée et aimante qu’il quittera pour  Rimbaud, le « Rimbe » comme il l’appelle, « l’époux infernal » qu’il a dans la peau. Délaissé par Rimbaud, il s’éprendra de deux jeunes gens et finira sa vie tiraillé entre  deux gaupes de Paris.


Dans les Fêtes Galantes, l’amour est plus raffiné, moins glauque. Il est empreint de sensualité. Dans le poème « Les ingénus »,  les jupes des demoiselles se balancent au gré du vent si bien que parfois on peut apercevoir nous dit-on « des bas de jambes» ou « des éclairs soudains de nuque blanche ». Notez qu’au XIXème siècle, les pieds et les jambes sont considérés comme très sensuels.
Dans « A la promenade », « la moue assez clémente de la bouche » apparaît comme une sorte d'invitation au  désir sensuel.

« Le ciel si pâle et les arbres si grêles
Semblent sourire à nos costumes clairs
Qui vont flottant légers, avec des airs
De nonchalance et des mouvements d'ailes.

Trompeurs exquis et coquettes charmantes,
Cœurs tendres, mais affranchis du serment,
Nous devisons délicieusement,
Et les amants lutinent les amantes, »



Mais,  cet amour ne dure que le temps de la fête. Il s'agit de flirts éphémères ou chacun joue un rôle, un « jeu dupe» comme le dit Verlaine. Les sentiments ne sont pas vraiment sincères. A travers ses poèmes, Verlaine nous dit que l’amour fait souffrir. Peut- être attend –il  autre chose, plus de constance, plus d'éternité ?
Dans « Colloque sentimental » le dernier poème du recueil, le poète observe un couple. L’un est encore amoureux mais l'autre a définitivement tiré un trait sur leur histoire d'amour. Il ressort de ce poème une grande mélancolie, une profonde tristesse qui plonge le lecteur dans le pessimisme.


Musique : Philippe Jaroussky : "Colloque Sentimental" de Debussy et Verlaine pour les trois premières strophes. De 0 à 1 min 10

(Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l'heure passé.

Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l'on entend à peine leurs paroles.

Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux spectres ont évoqué le passé.)

Puis lecture par 2 élèves différents :

- Te souvient-il de notre extase ancienne?
- Pourquoi voulez-vous donc qu'il m'en souvienne?

- Ton cœur bat-il toujours à mon seul nom?
Toujours vois-tu mon âme en rêve? - Non.

Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignions nos bouches ! - C'est possible.

- Qu'il était bleu, le ciel, et grand, l'espoir !
- L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

Musique : Philippe Jaroussky : "Colloque Sentimental" de Debussy et Verlaine pour la dernière strophe. De 3 min 05 à 3 min 33

(Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.)

Alors, comme pour se venger de la cruauté de certaines femmes envers lui, Verlaine se moque d’elles.
Dans « Cortège » il la ridiculise en faisant d’elle l’objet du désir  d'un singe est d’un petit enfant serviteur noir.

« Le singe ne perd pas les yeux
La gorge blanche de la dame,
Opulents trésors que réclame
Le torse nu de l'un des dieux ;

Le négrillon parfois soulève
Plus haut qu'il ne faut, l'aigrefin,
Son fardeau somptueux, afin
De voir ce dont la nuit il rêve ; »

Dans « L’allée », il lassimile à des « perruches » qui au sens figuré désignent des femmes bavardes tenant des propos sans intérêt. Il se moque de ses vêtements démodés et de tous les froufrous de sa tenue :

 « Fardée éteinte comme au temps des bergeries,
Frêle parmi les nœuds énormes de rubans,
Elle passe, sous les ramures assombries,
Dans l'allée où vers dix la mousse des vieux bancs,
Avec mille façons et mille afféteries
Qu'on garde d'ordinaire perruches chéries. »
Musique C. Debussy, Fantoches pour piano seul, de 41 seconde à 1 min 12.


Enfin, nous terminerons cette émission en parlant de la musique dans les Fêtes galantes. Car on ne peut parler de la poésie verlainienne sans aborder la musique. Dans son très célèbre « Art poétique »  Verlaine déclare que la poésie doit être « De la musique avant toute chose » et « De la musique encore et toujours !».
Cette musique, Verlaine l’imprime dans le style même de sa poésie. Pour cela, il utilise différents procédés stylistiques tels que
·         le vers impair dans « Mandoline » écrit en heptasyllabes
·         les rimes internes dans « Clair de lune » par exemple
·          les assonances et  les allitérations
·         Les  diérèses

 Mais, outre ce travail formel,  ce qu'il faut retenir essentiellement de la musique Verlainienne c’est qu’elle traduit les sentiments du poète. N’oublions pas que Verlaine était un poète symboliste et que sa poésie est suggestive : elle exprime plus que ce qu'elle dit explicitement.

En général, chez Verlaine c'est une musique propice à la rêverie et à la mélancolie, une musique douce « en mode mineur » comme nous l’avons dit au début de l’émission, une musique empreinte de langueur et de tristesse.
Musique Debussy, « Des Pas Sur La Neige », du début à 44 secondes


Mais lorsque le désespoir est  trop fort, la musique laisse place au silence, un silence de détresse et d’accablement. C'est le cas dans « En sourdine » où l'on n’entend que « le souffle berceur et doux » du vent et le chant du rossignol » qui incarne  « la voix du désespoir » du poète comme le dit Verlaine lui- même.

Calmes dans le demi-jour
Que les branches hautes font,
Pénétrons bien notre amour
De ce silence profond.

Laissons-nous persuader
Au souffle berceur et doux
Qui vient à tes pieds rider
Les ondes de gazon roux.

Et quand, solennel, le soir
Des chênes noirs tombera,
Voix de notre désespoir,
Le rossignol chantera.

 Le rossignol est  le symbole de la souffrance du poète, de son spleen.


La musique légère, mélodieuse et insouciante à peu de place dans les Fêtes galantes. Si bien que l’on se dit parfois que Verlaine aurait dû intituler son recueil Drames galants.


La grande musicalité des poèmes de Verlaine a inspiré  Claude Debussy qui a écrit 6 mélodies sur les poèmes des Fêtes galantes. Ce sont ces mélodies et d’autres du même compositeur qui nous ont accompagné durant toute cette émission.

Musique, Claude Debussy, Valse romantique, du début à 38 secondes.

C'est sur ces notes du compositeur que nous terminons notre pause verlainienne. Nous nous retrouverons l'année prochaine pour une nouvelle émission quelques minutes de littérature sur info RC



dimanche 8 avril 2018

L.A 5 Zoo


L.A n°5

Situation de l’extrait :
Après idée lumineuse de Lady Draper que le juge soumet à la Cour on parvient à une définition de l’homme: « L’homme, animal rebelle » (L.169).
Voir p. 127-128 les hommes se sont distingués des animaux en se rebellant ctre la nature, en s’en détachant « afin de la comprendre et de la maîtriser ». Ils se sont  « dénaturés ».  Ils ne se sont pas acceptés ds leur  état de nature/ naturel. L’homme est sorti de la nature et a voulu la comprendre. Et c’est pour la comprendre / tenter de l’expliquer qu’il a créé « l’esprit religieux » , la spiritualité.
si une trace de rébellion / spiritualité est décelée chez les tropis, nous pourrons les considérer comme des hommes.

l.186 « cet instant est solennel »  cf  l.171-172 : c’est la 1ère fois que l’hô est défini.

Rappeler différence entre plaidoirie et réquisitoire
Plaidoirie : argumentation qui vise à défendre un individu, une cause, une institution
Réquisitoire : argumentation qui vise à accuser un individu, une institution, une cause


Pbq : En quoi cet extrait constitue-t-il bien le dénouement de la pièce ?

On y retrouve le double enjeu de la pièce : définir la culpabilité de Douglas Templemore et définir la nature des tropis.


I En effet, cet extrait constitue le jugement de l’accusé/ verdict

A-      Tout d’abord, Douglas apparaît comme coupable

Ex 1 : l.199-205 Douglas lui-même démontre que  les tropis sont des hô par un Raisonnement inductif (de l’exple à l’exlicat° abstraite): le geste du fumage de la viande= « une cérémonie du feu, une ébauche d’acte rituel, de purificat° ou d’exorcisme- une forme primitive de tabou » (l208-210).
→Dougla plaide coupable comme le montre le l.212-215 : question rhétorique de Draper = affirmation inquiète car risque le mort + réponse affirmative de Douglas.

Ex 2 : s’ensuit  Réquisitoire du procureur Minchett et en 2 temps :
1.       Affirme incontestablement sa position avec :
·         l.241 question rhétorique
·         voc de la certitude   : l- 244  « plus de doute désormais pour personne » les 2 négations « plus » et « personne » insistent sur l’absence de doute possible quant à la nature de tropis et la culpabilité de Douglas.  / l.248 « la cause est claire »
2.       veut persuader les derniers sceptiques par la référence  à l’enfance maltraitée l. 253-254 et l’emploie de l’impératif exhortatif + exclamation.
·          
Ex 3 : JD essaie de l’inviter à se défendre :  phrases interrogatives 228-236 :,  « N’avez–vs rien à ajouter ? », « Pas mê pr les circonstances atténuantes ? »  Draper  insiste, veut pousser Douglas à parler, voudrait q’il se défende avt de ne plus en avoir le droit.



B.       Mais en fait, il est acquitté

Vercors instaure du suspense


Ex 1 : 1ère étape : Au départ, le lecteur/ spectateur est induit en erreur : Douglas commence par partir de l’expl qui montre thèse adverse : les tropis sont des animaux comme le montre l’emploi d’un vocabulaire destiné aux animaux « viande crue » l. 195, « dévorent » l .196.  De plus Minchett le fait remarquer: « vs plaideriez qu’ils sont des singes » → création d’un suspense, tension dramatique


Ex 3 : 2ème étape
-          l.262-268 deus ex machina : Deus ex machina : (latin, existait aussi en grec pr th. grec) Au théâtre, désigne un mécanisme servant à faire entrer en scène une divinité pour résoudre une situation désespérée. Plus largement,  toute résolution d'histoire qui ne suit pas la logique du récit mais permet au dramaturge de conclure sa pièce de la manière qu'il désire. Minchett donne une bonne déf° dans l’extrait : l.290 « diversion de dernière minute » = coup de théâtre final. Ce deus ex machina se produit grâce au juge (cf. + haut) mais se fait par l’intervention de Jameson, l’avocat. Il affirme son point de vue à savoir qu’une loi ne peut être rétroactive de manière habile.
-          il pose une série de questions à Minchett l. 274, 277, 279, 284, 293, 297, 302, questions auxquelles M répond
→soit de manière affirmative l.275, 278, 280
→ soit de manière hésitante, quand il a compris où Jameson veut en venir. Son hésitation se traduit par des points de … l. 285-286, 288, 294, 303, 306. Il n’a rien à opposer de convaincant. → renforce les propos de Jameson et leur validité.



II En outre, cet extrait donne une réponse à la question : qu’est-ce que l’humain ?

A.      C’est une définition empreinte de noblesse
Elle apparaît à 2 endroits ds la bouche de Draper

·         L. 309-310
Ex 1 : antithèse entre « Etat à subir » / « dignité à conquérir »
« Etat à subir » = attitude des animaux qui subissent et acceptent de ne faire qu’un avec la nature
«  Dignité à conquérir »  conquérir suppose une activité de combat, de lutte qui renvoie à la rébellion et « dignité » renvoie à un état de grandeur, valeur qui fait que l’hô est supérieur à l’animal.
être homme, c’est se rebeller contre un ordre établi, que ce soit celui de la nature ou celui de Dieu. C’est chercher à comprendre l’incompréhensible ; chercher à créer un plus grand bien →Noble

·         Cette grandeur, cette noblesse est illustrée par Douglas Templemore
Ex 2 : didascalie l.216 «geste de pendaison »→ rappelle le titre « assassin philanthrope ».  Il a mis sa vie en danger cô le rappelle le juge
Ex 3 : connotation particulière ds ce contexte d’ap. Guerre du mot « juste » =  les Justes sont ceux qui  ont mis leur vie en danger pour sauver des Juifs.  Parallèle tropis/ juif. D T a fait preuve de « courage » cô le rappelle Draper l. 226
→ héros.


B.       Mais c’est aussi une définition empreinte de pessimisme

Apparaît aussi à 2 reprises et contrebalance la vision qq peu idéalisée qui précède

Ex 1 : ironie L.245-246 de la Dame Quaker qui sous-entend que  devenir hô, c’est  aussi prendre les mauvais côtés de l’humanité « menteurs » / « voleurs ». C’est certes se dénaturer mais ds le mauvais sens du terme. Cf mythe du bon sauvage qui vivait au contac de la naure et que le progrès et la civ° ont  rendu mauvais.

Ex 2 : ironie L. 332 du moustachu qui laisse un goût amer au verdict qui au premier abord paraissait juste.    Douglas n’a-t-il pas été acquitté parce que derrière tout cela il y a des intérêts financiers en jeu ? Rappel visite du ministre p.30-31 qui a voulu influencer le juge Draper.

Ouverture de ccl° : Renvoie à l’éthique de la justice : la Justice n’est-elle pas au service, en définitive, des intérêts économiques ? La Justice est-elle bien indépendante ?

II En outre, cet extrait donne une réponse à la question : qu’est-ce que l’humain ?

A.      C’est une définition empreinte de noblesse
Elle apparaît à 2 endroits ds la bouche de Draper

·         L. 309-310
Ex 1 : antithèse entre « Etat à subir » / « dignité à conquérir »
« Etat à subir » = attitude des animaux qui subissent et acceptent de ne faire qu’un avec la nature
«  Dignité à conquérir »  conquérir suppose une activité de combat, de lutte qui renvoie à la rébellion et « dignité » renvoie à un état de grandeur, valeur qui fait que l’hô est supérieur à l’animal.
être homme, c’est se rebeller contre un ordre établi, que ce soit celui de la nature ou celui de Dieu. C’est chercher à comprendre l’incompréhensible ; chercher à créer un plus grand bien →Noble

·         Cette grandeur, cette noblesse est illustrée par Douglas Templemore
Ex 2 : didascalie l.216 «geste de pendaison »→ rappelle le titre « assassin philanthrope ».  Il a mis sa vie en danger cô le rappelle le juge
Ex 3 : connotation particulière ds ce contexte d’ap. Guerre du mot « juste » =  les Justes sont ceux qui  ont mis leur vie en danger pour sauver des Juifs.  Parallèle tropis/ juif. D T a fait preuve de « courage » cô le rappelle Draper l. 226
→ héros.


B.       Mais c’est aussi une définition empreinte de pessimisme

Apparaît aussi à 2 reprises et contrebalance la vision qq peu idéalisée qui précède

Ex 1 : ironie L.245-246 de la Dame Quaker qui sous-entend que  devenir hô, c’est  aussi prendre les mauvais côtés de l’humanité « menteurs » / « voleurs ». C’est certes se dénaturer mais ds le mauvais sens du terme. Cf mythe du bon sauvage qui vivait au contac de la naure et que le progrès et la civ° ont  rendu mauvais.

Ex 2 : ironie L. 332 du moustachu qui laisse un goût amer au verdict qui au premier abord paraissait juste.    Douglas n’a-t-il pas été acquitté parce que derrière tout cela il y a des intérêts financiers en jeu ? Rappel visite du ministre p.30-31 qui a voulu influencer le juge Draper.

Ouverture de ccl° : Renvoie à l’éthique de la justice : la Justice n’est-elle pas au service, en définitive, des intérêts économiques ? La Justice est-elle bien indépendante ?





L.A 4 Zoo...


L .A 4 : Acte II, tableau 9, p. 113 "Le Presbytérien : Il y a longtemps déjà que Wesley..." jusqu'à la fin du tableau.

Situation de l’extrait : devant la difficulté de dire si les tropis sont des hommes ou pas, le Président du jury demande à Justice Draper de les voir pour se faire une idée car,  comme il le dit  p 106 : « on a fait ici que parler d’eux […] Mais nous n’avons pas vu encore le bout de la queue d’un seul. Le Muséum les cache soigneusement. A peine si les journaux ont pu en publier quelques mauvaises photos ».  Les jurés se rendent donc au Muséum, et regardent  les tropis. Pour certains (Présbytérien/ Moustachu) ce sont des hommes, pour d’autres ( La Dame) , ce sont des animaux. Une querelle s’ébauche lorsque le Président du Jury demande à Justice Draper de rappeler la définition de l’humanité. Celui-ci précise qu’ « une telle définition n’existe pas ». Les jurés se remettent à se disputer mais cette fois sur  la définition de l’humanité.

PBQ : Pourquoi peut-on dire que dans cet extrait la tentative de définition de l'humanité se solde par un échec ?


I Tout d'abord toutes les définitions proposées sont contestables

A.      En effet, elles reposent sur des clichés, des lieux communs faciles et injustifiables
… Et les personnages ont bien du mal à prouver leur définition…

1.       La raison =  faculté propre à l'homme par laquelle il peut distinguer le vrai et le faux/le bien et le mal. Elle s'oppose à l'instinct, plus animal. Depuis le XVIIIe siècle : utiliser sa raison, c'est ne pas se fonder sur des croyances mais sur l'observation et les preuves.
Le Moustachu présente sa définition comme indiscutable :
Ex 1 : La majuscule veut la faire apparaître comme LA bonne définition. Énoncée dans une phrase courte et lapidaire, elle apparaît comme une évidence.

Mais le Moustachu montre lui-même les limites de sa définition par l'incapacité dans laquelle il est de se justifier:
Ex 2 : l’antithèse + La répétition l. 137- 138 « Bonne ou mauvaise,  la raison c'est la raison ». montre que sa justification tourne en rond et ne s’appuie sur aucune preuve, ce qui est un comble (ironique : la raison manque de preuves, de raisons).   Définition non valide.

2.       Bien évidemment la raison s'oppose à la religion comme c'est souvent le cas. Opposition classique
Pour le Presbytérien « L'homme,  c'est la foi en Dieu » l. 180.
Présente sa définition comme indiscutable :
Ex 3 : argument d’autorité : S’appuie sur un prédicateur, Wesley. 

Mais, sa définition a des limites : n’est valable que pour les croyants et encore, les anglicans. En outre, Wesley était contesté par l’Église.
Ex 4 : répétition d'une idée : Reprend la distinction clichée animal / homme par 2 fois l.129 et 132-133. Mais, se contente de répéter et ne justifie pas. Confond les 2. Tactique argumentative quand on est à court de justification. (disque brisé)

3.       La dame propose un autre cliché teinté de misanthropie : « les animaux sont bons et les hommes sont méchants » l. 167- 168.
Présente sa définition comme indiscutable :
Ex 5 : « Voilà » qui présente la certitude comme une évidence et ne veut pas être discuté.

Mais, sa définition a des limites
ex 6 : Le parallélisme et l’antithèse soulignent la simplicité de son raisonnement qui n'est d'ailleurs ni justifié ni développé.

B.      D'autre part, certaines définitions sont improbables, saugrenues,  étonnantes.

1.       Pour le colonel l'homme se définirait par sa « perversion sexuelle » l.151 entendre par là sa possibilité d'être homosexuel comme cela est évoqué l. 160 « la pédérastie ».
Présente sa définition comme indiscutable :
Ex 1 : Il étaye, sa thèse avec une question rhétorique  « mainte société brillante ne fut-elle pas fondée sur la pédérastie ? » qui est censée prouver son argument.
Mais sa définition a des limites
Ex 2 : il crée ainsi un amalgame entre l'homosexualité et l'intelligence d’une société. Cet amalgame crée la confusion comme le souligne la question du Moustachu qui n'a pas compris comme le lecteur - spectateur d'ailleurs.

2.       Autre définition de l'humanité : l'homme c'est l'Histoire. l.190-193. 
Présente sa définition comme logique par
Ex 3 : le chiasme l. 194-195 vient renforcer l’aspect logique de son propos.

Mais sa définition a des limites
Les différents mots repris dans l'énumération ne définissent pas l’homme et l’énumération, trop rapide,  n’explique pas comment on arrive à l’idée que ce qui fait l’humanité est l’Histoire. Et le chiasme est obscur.  Il est contredit par le gentleman qui oppose un argument de bon sens marqué par le connecteur « d’où » l. 196-197 (Ex 6)

3.       Dernière définition proposée : l’art.
Présente sa définition comme indiscutable :
Ex 4 : Le gentleman utilise un vocabulaire métaphorique pour impressionner les autres membres du jury.  « L'Histoire est un tombeau. L'Homme c'est- l'art. Le reste est silence. » Les trois phrases courtes se veulent marquantes et n'appellent pas de contestation.
Mais il est aussitôt contredit par le Moustachu qui, une fois de plus revient avec sa logique raisonnable l. 205-206 et l. 209 208. En usant d’un parallélisme (Ex 5) il reprend la justification du gentleman et montre que sa définition n'est pas valide, que son raisonnement est stérile. Il souligne en même temps que l'on tourne en rond.

II En outre la définition de l'humanité n'aboutit pas parce que les personnages ne  réfléchissent pas : ils restent subjectifs

A.      D’une part, on voit qu’ils ne veulent pas construire quelque chose ensemble mais imposer leur point de vue.

1.       C'est une lutte de conviction et de valeurs personnelles.

Ex 1 : Chacun essaie de donner la définition en utilisant la formule emphatique : « c'est » l. 130/ 132/ 167/ 194/ 203 qui leur permet de mettre en valeur leur idée et d'affirmer qu'ils ont raison.

2.       Ils s’opposent par une suite de réfutations.

Ex 2 : verbes subjectifs forts  qui montrent leur entêtement et leur impossibilité d'accepter le point de vue d'autrui: « je n'en démords pas » l. 175 et 180, « je proteste » l. 136, « je ne sors pas de là » l. 138, « Je me récuserais immédiatement.  » l. 141.


Ex 3: Le Moustachu lui retourne aussitôt l'argument grâce à un parallélisme de construction dans lequel il substitue à l'adjectif « raisonnable » les deux adjectifs « chrétien et charitable » l. 178 -179. Aux guerres qui ne sont ni une preuve d'intelligence, ni une preuve de philanthropie,   le Moustachu propose l'intolérance religieuse dont ont fait preuves les chrétiens tout au long de l'Histoire avec « brûler les gens sur des bûchers ».

Ex 4 : enchaînement par antithèses entre 2 modes de pensées : l'une spirituelle/ abstraite, l'autre matérielle/ concrète.
De la l. 181 à 188 la définition de l'homme devient quelque peu hasardeuse et incohérente.
De la définition de l'homme comme être raisonnable ou être croyant, on passe à l'humanité : « outil », « âme », «  travail », « ascèse », «  social »…. On ne voit pas le lien entre ces évolutions de définition. Elles s'enchaînent par une logique d'opposition entre le Presbytérien et le Moustachu et non pas une véritable logique. À la foi, notion abstraite, le Moustachu oppose l'outil, quelque chose de concret et qu'il connaît bien puisqu'il est éleveur. Aussitôt le Presbytérien oppose l'âme, également abstraite. A  laquelle, le Moustachu oppose le travail, concret. Le Presbytérien oppose au travail concret, l’ascèse, exercices spirituels personnels. Le Moustachu oppose « le social »  à quoi le Presbytérien oppose « la méditation », réflexion solitaire.  Pour le Moustachu, l'homme se définit par son pragmatisme et sa vie en société. Pour le Presbytérien l'homme se définit par la prière et le repli sur soi. Opposition comique.
La volonté d'avoir raison prend le pas sur la vérité.

B.      De plus,  ils sont agressifs.

Ex 1 : Ils se coupent souvent la parole : l. 129- 130 : points de suspension + didascalie « (l’interrompant)», + l.135-152. Aux l. 135-136 on ne laisse pas poursuivre la dame ( renvoie à une certaine misogynie qui consiste à considérer que les femmes sont inférieures et inintelligentes)

Ex 2 : Ils haussent  la voix ou le ton comme l'indiquent les didascalies : l. 131 « (fort) », l. 176 « (agressif) », l. 180 « (crescendo ») et l. 182 « (même jeu) », l. 207 « (agacé) »


Ex 3 : les nombres exclamations qu'ils emploient montre leur énervement l. 143,157 158 166 176 184 à 189.

Ex 4 : Ils utilisent un vocabulaire dépréciatif pour parler de l’avis de l'autre l. 143 « damnées bondieuseries » l. 182 « connerie de sacristie », l. 158 « pervers », péché », l. 166 « dégoutants », l. 174 « stupidité ».

Ex 5 : Gestes : lorsqu'ils sont pris de court le Moustachu et le Presbytérien menacent de partir 141-142l et même de se battre l.189 « ils sont très en venir aux mains ».



Ouverture de ccl° : Une fois encore on se retrouve dans l’impasse. Le lecteur-spectateur commence à s’inquiéter. Va-t-on enfin arriver à une définition de l’humanité qui permettrait de classer définitivement les tropis ou la pièce va-t-elle se clore sur un statuquo, dans la confusion et l’agressivité comme pourrait le laisser penser l’échange absurde entre Le Mustachu et Le presbytérien dans cet extrait ?  On a un peu peur en effet que le rideau ne tombe sur une dispute générale du même type que celle qui clôt La Cantatrice chauve, où les personnages hurlent les uns aux oreilles de autres des propos incohérents.